Ouibiensûr. Bien sûr que je la vois.
Mais je vois surtout la personne accrochée à la corde. Par le cou. Dur de la louper. Mais je ne sais pas pourquoi je m’en rappelle maintenant.
Je n’ai jamais compris ceux qui veulent mourir. Assez triste pour ne pas apprécier la vie mais pas assez désespérée pour vouloir en finir, je suppose. Et puis, y’a toujours un truc qui me dit que j’ai encore des trucs à vivre.
Un devoir à rendre le lendemain. Un appel à passer ou à recevoir. Un dessin à finir, car je n’ai toujours pas reçu l’encre que j’ai commandée. Une sortie à faire. Un jeu à tester, car j’ai eût de bons feedbacks. Un film à télécharger, aussi, car la bande annonce à l’air bien. Un dernier mail à envoyer, car il faut absolument que je réponde à ça. Caresser mes chats. Enfin me décider sur ce que je veux pour mon anniversaire.
Damn. Ma vie est remplie. Dans mon dos, sans que je ne m’en rende compte.
Bref. Un comédien est mort ce soir. Quelqu’un sait.
Piètre référence, surtout que je ne connais pas la charmante personne qui s’est dit que manger les pétunias par la racine, c’est mieux.
Une voisine. Une femme qui était heureuse, apparemment. Pas assez, vu ce que je vois. Il paraît que ça leur a pris du temps, de la décrocher. Corde solide en hauteur. Un des grands arbres du jardin. J’avais une vue imprenable, ce matin là, en regardant par mon velux. Mais j’ai rien dit. Je ne voyais pas l’intérêt de prévenir qui que ce soit.
Les zombies ne hantent pas encore nos rues, et de toute façon, perchée comme elle est, nous ne risquions pas grand-chose. A part peut être perdre le sommeil à force d’entendre ses grognements d’outre-tombe.
Pas comme si j’arrivais à dormir.
Pas comme si j’arrive à dormir.